La dépression post-partum
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Si l’on m’avait dit avant mon accouchement que je ferais partie des 19% des mères souffrant de dépression post-partum légère, j’aurais très probablement ri.
Ce n’est qu’au moment où une travailleuse sociale entra dans ma chambre à peine 24 heures après mon accouchement que tout a changé. Selon elle, vu les complications de mon accouchement, j’étais plus à risque d’être atteinte d’une dépression post-partum. Ces mots m’ont glacé le sang, mais je les ai rapidement ignorés par la suite. Je n’aurais pas dû; je voulais tellement être parfaite en tant que maman que je me suis encore plus épuisée. Deux mois plus tard, le verdict était tombé : j’étais bel et bien atteinte de dépression post-partum.
Le diagnostic m’avait anéantie et les mots suivants me trottaient à l’esprit : « Ça y est, je suis faible, je suis une personne à problème. » Dans ma famille, tout ce qui touche à la santé mentale est qualifié comme étant tabou. Par ce fait, je ne voulais pas en parler à qui que ce soit et je tenais à m’en sortir seule. J’ai toutefois compris que j’aurai besoin d’aide pour le faire. C’est grâce à l’aide d’une travailleuse sociale que mon processus de rémission commença.
Ces deux derniers paragraphes abordent brièvement mon expérience et ne sont qu’une mise en contexte. Oui, je suis toujours atteinte de dépression post-partum, mais mon cheminement m’a fait comprendre plusieurs choses et ces dernières m’aident à guérir :
- Les « supermoms » n’existent pas. Même si on le désire si ardemment, il est impossible d’être parfaite. Depuis que je suis jeune, je me faisais taper sur les doigts si je faisais quelque chose de travers et je devais bien performer partout où je passais. Sans surprise, à cause de cela, je voulais être une maman parfaite. Devenir mère est un apprentissage en soi et ce, peu importe notre expérience. Il faut allouer un temps d’adaptation et faire preuve d’indulgence dans le but de relativiser. Il est permis de se tromper.
- Vouloir être en mesure de suivre le même rythme de vie qu’avant est irréaliste. Il est normal qu’il soit difficile d’accomplir plusieurs tâches ménagères. Ce n’est pas grave s’il reste de la vaisselle dans l’évier ou si l’aspirateur n’est pas passé quotidiennement. Il faut apprendre à être réaliste et à voir l’essentiel afin d’être pleinement en forme pour s’occuper de Bébé. Il est également possible de demander de l’aide de nos proches, car disons-le, certains espèrent nous venir en aide et ne demandent que cela. Cela prend un village pour élever un enfant. Obtenir un coup de pouce ne fait pas de nous des personnes faibles.
- Apprendre à dire non est sans doute un élément plus difficile à effectuer, mais demeure un principe essentiel. Il arrive que certaines personnes veulent être trop présentes au point de nous épuiser. Généralement, ces personnes ne savent pas où se trouve notre limite; elles ne disposent pas de boule de cristal pour lire nos pensées. Apprendre petit à petit à cerner nos besoins nous permet de mieux nous affirmer. Par ce fait, en connaissant nos besoins, nous sommes en mesure d’instaurer des limites.
- Le dernier élément clé dans la guérison est de prendre du temps pour soi. Dieu sait qu’une mère se prive souvent de faire des choses qu’elle aime, car elle se donne pour son enfant et sa famille. Or, elle ne doit pas se négliger. Un des principes de rémission de la dépression est de réactiver sa vie, de prendre du temps pour soi. S’allouer une heure pour la consacrer à une activité que l’on aime permet de se changer les idées et de reprendre le moral. Cela nous fait également comprendre que nous pouvons continuer de vivre, car nous avons tendance à nous oublier.
La dépression post-partum reste un phénomène tabou selon plusieurs personnes, mais il est plus fréquent que l’on ne le pense. Le processus de guérison peut durer des semaines, même des mois, pourvu qu’il soit accompli graduellement et avec l’aide adaptée à chacun. Accepter de l’aide pour s’en sortir, c’est s’offrir une fleur en acquérant toutes les forces nécessaires pour surmonter les futures épreuves mises sur notre chemin. La dépression post-partum ne constitue pas une faiblesse, mais elle offre une opportunité d’apprendre à mieux se connaître. Le simple fait de parler de ce sujet ou de raconter notre histoire peut toucher plus de personnes que l’on ne le pense et ce, positivement.
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Alexandra Fournier